Séjour plongée sur l'île Rodrigues


Une île où la nature est préservée, cela existe encore. Rodrigues, petite île perdue au milieu de l’océan Indien, en est l’exemple. Mais pour combien de temps encore ? Partagée entre le développement touristique et économique et la préservation d’un environnement terrestre et sous-marin exceptionnel, la population de cette dépendance de l’île Maurice, à la réputation d’île tranquille, hésite sur son avenir. Les chasseurs de paradis doivent se dépêcher...

Si vous parlez de l’île Rodrigues dans une conversation, bien peu de personnes sauront situer exactement où se trouve cette île. Certains la placeront dans les Caraïbes, la plupart donneront leur langue au chat...

Rodrigues est une petite île au milieu de nulle part, à environ 600 km au nord-est de l’île Maurice, au cœur de l’océan Indien. Avec ses 18 km de long sur 8 de large, elle a la superficie d’une petite commune française et compte 35000 habitants, la plupart agriculteurs ou pêcheurs. Elle fut autrefois une réserve où les navigateurs, mais surtout les Mauriciens et Réunionnais venaient puiser allègrement. On y trouvait de grandes forêts dont le bois était bien utile pour la construction et la réparation des bateaux. On y trouvait aussi des quantités phénoménales de grandes tortues terrestres semblables aux tortues géantes des Seychelles, véritables garde-manger pour les navigateurs de passage, en quête de vivres frais. On pouvait les embarquer vivantes sur les bateaux où elles pouvaient vivre des semaines sans pratiquement rien manger, et quand on avait besoin de viande fraîche, il suffisait d’en tuer une. C’était un excellent moyen de lutter contre le scorbut, sur des bateaux où les conserves et les congélateurs n’existaient pas encore... Les nombreuses tortues marines qui venaient pondre sur les plages de l’est de l’île étaient aussi très appréciées. Pensez donc, après des mois de mer à manger de la viande séchée, le plaisir d’une énorme omelette !

C’est ainsi que cette belle île d’origine volcanique fut dévalisée de ses richesses au fil des siècles. Ainsi, au début du 20e siècle c’est un grand oiseau endémique de l’île, le solitaire, proche du dodo mauricien, qui disparaissait définitivement, suivant son cousin de l’Isle de France...


Aujourd’hui, la déforestation a laissé des traces, surtout près du littoral. Le centre de l’île, dont le relief monte jusqu’à 400 m d’altitude et reçoit d’importantes précipitations, abrite encore des forêts tropicales, bambous, manguiers, bananiers, etc., ainsi que de nombreuses cultures. Les plages sont bordées de filaos qui ont été plantés pour retenir le sable. Des mangroves sont réimplantées dans les embouchures des nombreuses rivières. Le lagon lui-même est extraordinaire puisqu’il couvre une surface beaucoup plus importante que l’île. A l’est, la barrière corallienne se trouve à quelques centaines de mètres de la côte alors qu’au nord, à l’ouest et au sud, elle s’éloigne parfois jusqu’à 8 km de la côte. Des îlots vierges d’habitations abritent des colonies d’oiseaux à l’intérieur même de ce lagon que l’on peut traverser à pied à marée basse, tant il est peu profond.

Sur Rodrigues, le tourisme n’a pas encore pris l’essor que l’on connaît sur l’île voisine de Maurice. Seuls trois hôtels d’une quarantaine de chambres existent actuellement sur des sites privilégiés, en dehors des traditionnelles pensions de familles. Cinq centres de plongée fonctionnent sur l’île, dont trois installés dans les hôtels (Cotton Bay, Mourouk et Pointe Vénus), les deux derniers étant des clubs associatifs ayant pour vocation la protection de l’environnement et l’éducation des îliens.

L’environnement marin est l’objet d’une surveillance approfondie. Le récif est extrêmement bien préservé sur l’extérieur du lagon. Ici, pas de pêche aux explosifs ni de chaluts. La plupart du temps, les pêcheurs n’osent pas faire franchir les passes de la barrière à leurs frêles embarcations, de peur de se retourner dans la houle venue du large, poussée par les alizés. Les fonds peu importants aux abords de l’île sont souvent brassés par la houle et l’eau, chargé en particules, présente une visibilité très variable. La rencontre des poissons est assez variable en fonction des marées, mais il n’est pas rare de rencontrer, outre la faune récifale propre à ce genre d’environnement, des tortues, des bancs de carangues ou aussi des carangues géantes, des thons, des requins et parfois une dorade coryphène...


On ne peut pas plonger à l’intérieur du lagon du fait de sa faible profondeur, mais on peut y faire de très belles promenades en snorkeling. Dans un à deux mètres d’eau, toute la faune récifale prend ses aises dans la lumière du soleil. Attention tout de même aux courants, toujours sortants, qui peuvent être importants aux abords de la barrière. L’extérieur du lagon recèle les plus belles plongée sur des massifs vierges de toute agression. Ces plongées sont soumises aux caprices de la météo car elles se trouvent sur la partie exposée aux alizés et à la houle du large. Les nombreuses passes présentent aussi des plongées pleines de surprises et riches en rencontre, dans une eau chargée et un courant qui peut être fort.

Rodrigues est une île très sympathique où l’on peut prendre le temps de vivre dans le calme.